Une météorite exceptionnelle permet de contraindre la croûte ancienne de Mars !

Publié le 11 Décembre 2013

Résumé
Les analyses chimiques et isotopiques (oxygène) ont révélé que la météorite NWA 7533, récoltée au Maroc, provient de Mars et qu'elle est le premier échantillon des terrains les plus anciens de Mars disponible en laboratoire. Plus spécifiquement, cette météorite est extraordinaire car elle correspond à une roche différenciée type croute supérieure, semblable à ce que les satellites et les rovers ont pu mesurer à la surface de Mars et, contrairement aux plus classiques météorites marsiennes provenant du manteau ou de la croûte profonde.
 
L’analyse des zircons qu’elle contient démontre que, comme celles de la Terre et de la Lune, la croûte de Mars était déjà solidifiée il y a 4,428 +/- 25 milliards d’années. Cela corrobore l'hypothèse d'une différenciation précoce de la croûte marsienne dans les premiers 100 millions d'années de l'histoire de cette planète.
 
En outre, l'abondance des éléments incompatibles fournit une estimation de l'épaisseur de cette croûte marsienne d'environ 50 kms, comparable à ce qui est détecté par les outils géophysiques.
 
De plus, la météorite contient également des agrégats à la granulométrie très fine qui sont probablement le sol ancien de la planète compacté il y a 1,712 +/- 85 milliards d’années. L’oxydation de ce matériau suggère que la planète était déjà rouge dès cette époque-là. Telles sont les conclusions d’une étude menée par des chercheurs d'instituts de recherches américains, australiens et français et publiées aujourd’hui dans la revue Nature.
La planète Mars. Crédit: Steve Lee/Jim Bell/Mike Wolff/NASA

La planète Mars. Crédit: Steve Lee/Jim Bell/Mike Wolff/NASA

On connaît à l’heure actuelle 68 météorites martiennes, pratiquement toutes issues des profondeurs de la croûte de Mars. Ces météorites ne ressemblent pas aux terrains très anciens couverts de cratères qui couvrent plus de la moitié de la surface de Mars et qui sont analysés par les sondes qui survolent la planète et par les rovers Opportunity et Curiosity. Une équipe internationale de chercheurs vient de montrer que la météorite NWA 7533 constituait le premier échantillon de ces terrains disponible en laboratoire. À défaut de savoir précisément de quel cratère est issue NWA 7533, cela permet de mener des analyses bien plus précises que celles que peuvent effectuer les rovers, les deux approches étant complémentaires.
La météorite NWA 7533

La météorite NWA 7533

Les chercheurs ont ainsi pu analyser les zircons présents dans la roche et dater la cristallisation de ceux-ci à 4,4 milliards d’années, un âge qui correspond précisément à celui des autres zircons les plus anciens connus dans les roches lunaires et terrestres. Cela indique que la croûte de Mars s’est solidifiée très tôt, en même temps que celle de la Lune et de la Terre. C’est la première fois que des zircons formés dans la croûte de Mars ont pu être analysés aussi précisément.

La météorite martienne NWA 7533 est clairement une pierre issue de la même chute que NWA 7034, trouvée peu de temps avant au même endroit (près de Bir Anzarane au Maroc). NWA 7034, analysée par un groupe de chercheurs américains (et baptisée par eux « Black Beauty » en raison de sa couleur noire) avait été interprétée comme une roche d’origine volcanique. Les travaux publiés dans la revue Nature montrent que NWA 7533 contient, et contenait déjà il y 4,4 milliards d’années, une importante quantité d’éléments chimiques dits « sidérophiles », c’est à dire ayant une forte affinité pour le métal. Ces éléments tels que le nickel et l’iridium, concentrés dans le noyau des planètes, sont peu abondants dans les croûtes où leur présence en grande quantité ne peut qu’être le résultat d’un ou plusieurs impacts météoritiques. NWA 7533 provient donc d’un terrain ancien et cratérisé de Mars comme ceux qui couvrent l’hémisphère sud de la planète.

NWA 7533 recèle vraisemblablement un grand nombre d’autres informations essentielles concernant l’histoire précoce de la planète Mars et l’équipe poursuit ses études, notamment dans le but de reconstituer les conditions de son altération hydrothermale. Un échantillon d’une vingtaine de grammes de la météorite a été confié par le collectionneur Luc Labenne aux chercheurs dans le but de mener à bien ces travaux, à l’issue desquels cet échantillon intégrera les collections du Muséum.
Munir Humayun et la météorite NWA 7533 (National High Magnetic Field Laboratory, Florida State University). Crédit: FSU

Munir Humayun et la météorite NWA 7533 (National High Magnetic Field Laboratory, Florida State University). Crédit: FSU

Rédigé par ASK

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